Avec son caractère sociable, sa démarche gracieuse, et sa bouille des plus adorables, la loutre s’est convertie, en quelques années, en un véritable phénomène de mode. L’engouement médiatique et populaire autour de ce petit mammifère de la famille des mustélidés est tel que certains pays, comme le Japon ou l’Argentine, considèrent aujourd’hui la loutre comme un animal de compagnie à part entière. C’est oublier, pourtant, qu’elle reste un animal sauvage menacé, habitué à un habitat naturel bien différent de l’environnement procuré par un(e) simple maison et/ou appartement. Pour toutes ces raisons – et bien d’autres – certains pays, comme la France, préfèrent en régulariser strictement la commercialisation. Alors, faut-il adopter une loutre comme animal de compagnie? Quels sont les questions légales, éthiques, voire économiques, que le phénomène soulève? Nous vous aidons à y voir plus clair.
D’où vient la loutre ?
La loutre est un petit mammifère carnivore de la famille des mustélidés, qui compte également la belette, le putois, l’hermine, le blaireau, ou encore le furet. À la différence de bon nombre de ses pairs, elle s’épanouit en milieu humide et semi-aquatique, comme les mangroves, les marais, ou les ruisseaux. Elle se nourrit essentiellement de petits animaux aquatiques (poissons, crevettes, …). S’il existe plus d’une dizaine d’espèces de loutres à travers le monde, toutes se caractérisent par une longue queue puissante, ainsi que de courtes pattes, surmontées de doigts palmés et aux griffes acérées.
On trouve ainsi la loutre d’Europe (qui vit dans les rivières d’Europe et d’Afrique du Nord), la loutre de mer (la seule espèce de loutre en eau salée), la loutre du Canada (originaire des rivières de l’Amérique du Nord), la loutre géante (qui peuple les cours d’eaux d’Amazonie), ainsi que la loutre cendrée, particulièrement présente en Asie. Cette dernière, la plus petite des espèces de loutres, est aussi la plus appréciée comme «nouvel» animal de compagnie, notamment pour son caractère joueur et sa mine adorable, mais aussi sa capacité à s’adapter à la vie terrestre. Certains cafés et restaurants du Japon n’hésitent d’ailleurs pas à la mettre en scène, proposant photos et autres tours aux visiteurs. Les réseaux sociaux – asiatiques principalement – se font également le vecteur de cette nouvelle et dangereuse tendance. Outre les questions d’éthique que le phénomène pose, certains problèmes légaux sont également à considérer.
Adopter une loutre : que dit la loi ?
Menacée par de nombreux facteurs anthropiques, comme la chasse, le braconnage, la déforestation, ou la pollution des océans, la loutre fait partie de la longue liste des espèces animales vulnérables et/ou en voie de disparition. À ce titre, plusieurs pays ont pris les devants pour protéger l’espèce, interdisant purement et simplement la détention de loutres cendrées domestiques. C’est le cas du Royaume-Uni, par exemple, ainsi que de la majorité des états des États-Unis. Toutefois, tous les pays n’ont pas la même position sur le sujet. En Argentine, au Mexique, au Japon, et dans le reste du Sud-Est asiatique, où elle déchaîne bien des passions, la loutre cendrée est commercialisée comme animal domestique. En France, il est légal d’adopter une loutre, sous réserve d’autorisation préalable. Néanmoins, la réglementation reste particulièrement stricte.
Comment adopter une loutre en France ?
Depuis 1981, la loutre est un animal protégé par la loi française. Si son adoption comme animal domestique n’est pas exclue, elle reste toutefois régie par plusieurs contraintes administratives, parmi lesquelles l’obtention d’une déclaration de détention d’animal d’espèce non-domestique et un certificat de capacité autorisant l’adoption de l’animal. Ces deux documents sont à obtenir auprès de la préfecture de votre département de résidence. Dans le cas d’une vente ou d’une donation postérieure, le nouveau propriétaire doit également se trouver en possession des mêmes certificats.
Vous devez également veiller à vous procurer l’animal auprès d’une animalerie, d’un éleveur ou encore d’un particulier agréé(e). Au moment de l’achat, vous recevrez une fiche avec le numéro d’identification de l’animal, ainsi qu’un document attestant des caractéristiques de l’espèce de loutre en question (nom scientifique et commun, longévité, taille adulte, état de protection, habitat de prédilection, régime alimentaire, comportement, …). Sachez, pour information, que la détention illégale (sans autorisation) d’un animal sauvage et protégé est passible, en France, d’une peine de prison d’un an et de jusqu’à 15000€ d’amende.
Adopter une loutre: pourquoi est-ce une mauvaise idée ?
Joueuse, sociable, et agréable à vivre, la loutre peut constituer un animal de compagnie idéal. Pourtant, au-delà des questions éthiques qui entourent la commercialisation d’une espèce protégée (braconnage, contrebande, menace d’extinction, …), l’adoption d’une loutre n’est pas nécessairement recommandée, pour des aspects d’ordre pratique.
D’abord, la loutre reste un animal sauvage qui requiert un habitat bien particulier pour s’épanouir: un accès à un bassin d’eau douce, mais aussi un endroit de terre ferme avec branchage et plantes qu’elle pourra creuser et explorer à sa guise. Le tout, dans un espace d’environ 60 m², la loutre sauvage évoluant dans de larges superficies. Par ailleurs, il s’agit d’un animal très sociable, qui nécessite la compagnie d’un(e) ou plusieurs congénères pour être heureux. La loutre a également des besoins très spécifiques. Son eau doit être parfaitement claire, libre de toutes impuretés. Quant à la quantité recommandée de nourriture, il faut compter un minimum de 350 grammes de poisson par jour pour la rassasier. Tous ces aménagements représentent alors un certain budget, qu’il est important de prendre en compte au moment de l’achat.
Enfin, adopter une loutre n’est pas non plus sans risque pour les familles avec enfants. Peu habituée au contact humain, ses réactions peuvent en effet se montrer parfois imprévisibles; or, sa mâchoire est constituée de dents pointues et puissantes, potentiellement dangereuses en présence de jeunes enfants. Autant de raisons qui invitent à une profonde réflexion, avant de se lancer dans l’adoption d’une loutre.